Le signifiant et l'efficacité matérielle de la cure par la parole : une recherche expérimentale

Mots clés

signifiant, psychanalyse, psychologie expérimentale, eye tracking, EEG, neuropsyhanalyse

Détail de l'offre

Un contrat doctoral pour une recherche en psychanalyse, à l'interface de la psycholinguistique et des neurosciences, est proposé. Il s'agit d'unethèse, dans la continuité des idées étayées dans 'Des fantômes dans la voix. Une hypothèse neuropsychanalytique sur la structure de l'inconscient' (Liber, 2007).
Freud (1897) a proposé que les objets ou situations cliniquement saillants – comme, par exemple, un scarabée (Käfer en Allemand) dans l'attaque de panique de Monsieur E – renvoient par leur forme phonologique, et non par leur signification, à des événements étiologiquement importants – ici, « Que faire ? » qui résume l'indécision de la mère de Monsieur E concernant son mariage avec le père de Monsieur E. Jacques Lacan (1966) a formalisé ces idées en attribuant au signifiant une efficacité mentale à part entière, ce qu'il résume par « l'inconscient structuré comme un langage ». L'idée est celle d'une mise à l'épreuve expérimentale de cette hypothèse de l'effectivité mentale du signifiant – les signifiants ont un effet sur le traitement mental non seulement par les significations qu'ils produisent, mais aussi par leur forme, leur matérialité – qui est une des propositions les plus originales et potentiellement les plus transformatives de la psychanalyse Freudo-Lacanienne. Elle est aussi, jusque-là, l'hypothèse exclusive de la psychanalyse et vient ponctuer l'idée qu'il faille l'intime de la clinique pour informer sur un champ de vérité par ailleurs hors de portée.
Nous avons mis au point un paradigme d'amorçage rébus (Olyff & Bazan, 2023). Cette recherche montre que nous résolvons des rébus sans le savoir. Elle montre donc que notre façon d'appréhender le monde environnant intervient dans notre traitement mental non seulement selon le mode généralement admis, qui est le mode ‘visuosémantique' (ex. Kosslyn, 1994) mais également sur un mode ‘visuophonologique'. Dans la compréhension visuosémantique notre saisie de l'image de l'objet active la signification de l'objet – ex. voir une table peut réveiller les associations ‘manger à', ‘déposer sur', ‘travailler à', etc. Dans la compréhension visuophonologique, notre saisie de l'image de l'objet active également la phonologie du nom de l'objet (ou du fragment de langage associé à l'objet) et, de façon surprenante, également les significations ambiguës de cette phonologie - ex. voir une table peut réveiller aussi les associations aux mots 'étable', 'cartable', 'portable' etc. De façon similaire, voir les images d'un pain et d'un seau peut amorcer la sphère de la peinture par l'intermédiaire de la résolution du rébus 'pinceau'. Il s'agit d'une démonstration qui peut étayer l'effectivité matérielle de la cure par la parole, et ses effets par l'ambiguïté, en inscrivant scientifiquement cet effet du signifiant, tel un principe actif, dans une démarche de démédicalisation de la prise en charge de la détresse mentale.
Concrètement, il s'agira de mobiliser les méthodologies de l'eye-tracking et des potentiels évoqués pour révéler le traitement mental au plus près de l'événement linguistique. Bien que le périmètre de la recherche soit donc bien établi a priori, la signification de la recherche mettra le futur docteur dans une position épistémologique des plus intéressantes avec en aval une série d'effets non-anticipables, y compris du côté de l'éthique et de la politique.